Wally Olins, père de l’identité de marque territoriale

Né en 1930, Wally Olins est un designer britannique à qui l’on doit le concept de marque territoriale. Par son travail de conseil en branding, il porte en Grande-Bretagne et dans le monde l’idée que l’identité de marque est d’une importance capitale, et qu’elle a une influence sur tout ce que les organisations font et disent d’elles-mêmes. Il travaillera notamment avec Renault, Orange, le Tate modern, Volkswagen, 3i, Tata, Q8 et siglera bien d’autres entreprises. Depuis sa mort en 2014 son agence Wolff Olins a produit entre autres le logo d’uber et celui du musée Met à New York.

La naissance des identités territoriales

D’origine anglaise, Wallace Olins -dit Wally- s’intéresse assez vite à l’image de marque avant même que le terme n’existe et prend goût pour cette branche publicitaire consistant à construire une réputation durable pour une marque. Wally Olins se démarque rapidement dans ce domaine et intéresse de plus en plus d’entreprises et d’ONG, pour lesquelles il collabore étroitement directement avec les directeurs.

Olins est persuadé que les entreprises doivent être impliquées dans cette recherche d’identité, et non relayées au seul rang d’observateur. Grand voyageur, il travaille en Irlande du Nord, à l’île Maurice, en Pologne, Lituanie ou au Bengale. Il aide ainsi les régions, les collectivités et les États à trouver leur image. 

Génie et pionnier en identité territoriale et image de marque, il co-fonde Wolff Olins avec Michael Wolff en 1965 à son retour à Londres, et Saffron Brand Consultant en 2001. Il peut ainsi se démarquer dans le design de territoires, et travaillera par exemple sur la campagne d’identité de la Pologne ou l’identité visuelle d’Øresund, le pont et tunnel qui lient la Danemark à la Suède. Mais son métier de conseil pour les entreprises l’amène surtout à travailler pour des entreprises de plus en plus grosses, possédant de nombreuses filiales n’ayant plus de lien avec leur maison mère. En créant du sens et du lien entre ces filiales et leur siège, l’agence Wolff Olins de démocratiser ce qui s’appellera plus tard « l’architecture de marques ». Qu’on l’appelle design de marque, identité de marque, ou réputation, Olins précise que tout revient au même, que « c’est la manière qu’ont les entreprises de se présenter. »

Relier les gens avec des couleurs et des ponts

Il est difficile de discerner le travail d’Olins en tant que designer seul. Les travaux sont toujours signés par le nom de l’agence et de ses deux fondateurs, Wolff et Olins. Sans savoir exactement qui a fait quoi et en supposant que c’est un travail d’équipe, penchons-nous sur quelques-uns de leurs plus célèbres logos pour balayer des réussites et des échecs, en branding de marque et de territoire.

Dans une interview, Olins expliquait qu’un bon logo doit faire 4 choses. D’abord, il doit être émouvant et rationnel à la fois; s’adresser aussi bien au coeur qu’à la tête des gens. Deuxième point, il doit être pertinent pour toutes les parties prenantes. Troisième point, il doit être distinct. Le but d’une identité graphique étant de se distinguer des concurrents. Et quatrième point, il doit être vrai; il doit venir du coeur de la marque, éviter les clichés et souligner un concept qui doit être reconnu comme réaliste et inspirant pour toutes les cibles. En théorie cela semble tenir la route, mais dans la réalité… rien n’est si facile !

Orange, la boîte à couleurs

En 1990, le géant chinois de la télécommunication Hutchison Whampoa limited décide de fonder le 4è réseau téléphonique de Grande Bretagne. L’entreprise fait appel à l’agence Wolff Olins pour développer une marque qui n’aura rien de technologique mais fera de la simplicité, l’ouverture et l’optimisme ses mots d’ordre. Comme l’explique l’entreprise de conseil en stratégie de marque, « nous avons donné au réseau le nom d’une couleur, et non un nom lié aux télécoms comme Vodaphone ou Cellnet. Nous avons créé un style de communication chaleureux et humain qui est vite devenu mondialement reconnu. » orange était né.
Depuis, l’entreprise a été rachetée par France Télécom en l’an 2000, et son image remise au goût du jour. Au coeur de cette nouvelle communication, le rectangle -donc la marque- s’ouvre à ses clients et au monde, en s’adaptant à chaque besoin en particulier. Cette campagne plutôt simple et efficace semble assez cohérente avec la communication initiale de la marque et l’époque actuelle.

Øresund, territoire relié et reliant

Øresund est le pont-tunnel qui relie la Suède au Danemark, de Malmö à Copenhague. Olins était responsable de ce projet d’ampleur, mené dans les années 2000. Il est malheureusement très difficile de trouver des éléments graphiques sur ce sujet aujourd’hui, à part le logo, et encore (cf photo ci-dessus). On en conclut donc que le projet n’a pas perduré… Le logo retrouvé présentait les deux villes comme des points distincts à l’intérieur d’un grand territoire. Il ressemblait aussi particulièrement à des yeux de personnage de bande dessinée, mais l’intention n’était peut-être pas voulue.
En revanche, le sujet de création d’identité territoriale est passionnant. Deux cultures, deux pays, deux langues, deux éléments : l’air et la mer. L’intention politique explicitement formulée derrière ce projet était d’aider les résidents à s’identifier non plus à un pays mais à une région, de part et d’autre du pont. Du côté Suédois, à l’est, la région du Skåne est connue pour être la Californie scandinave. Tout l’enjeu du logo était donc de mettre en avant ce dynamisme et d’entrainer un changement de perception du territoire, que ce soit dans sa délimitation que dans son contenu. Olins explique que le branding de territoire est compliqué car il doit établir un lien et connecter la perception de cet espace à la réalité.

« La difficulté des marques transfrontalières est le besoin d’unir des gens de cultures différentes mais aussi faire passer le bon message au reste du monde.« 

AOL. la marque qui voulait être transparente

Dans les années 90s, Aol. (American Online) était l’une des uniques plateformes pour surfer sur le web aux États-Unis. Mais avec l’évolution rapide des technologies, Aol. s’est retrouvé à la traine, sans arriver à rattraper son retard, passant de 27 millions d’utilisateurs en 2001 à 6 millions en 2009. Elle demande alors à Wolff Olins de concevoir sa nouvelle identité visuelle, afin de la positionner comme une  » entreprise de média du 21ème siècle ».
Les trois lettres majuscules changent en bas de casse pour former visuellement un mot, qui pourtant se lit encore comme un acronyme, grâce au point. Contrairement à d’autres marques, le logo d’Aol n’existe que grâce à son support. C’est un logo qui est, comme internet, dynamique, changeant, et invisible sans contenu. L’agence demande à plusieurs artistes dans le monde d’habiller le logo pour le faire vivre ; il se déploie sur des taches d’encres, un poisson rouge, des gribouillages, des oiseaux, fleurs ou feuilles, des personnages dessinés, un chat qui saute, ou des coulées de peinture. Le but de cette collaboration étant de travailler avec des artistes, journalistes et des musiciens pour créer « des expériences au contenu extraordinaire ».

Source : Article de « grapheine.com », publié en octobre 2019. Lien vers l’article.