Pour sa première grande exposition parisienne Hassan Hajjaj, la Maison européenne de la photographie donne carte blanche au photographe londonien d’origine marocaine. Il transforme cette dernière en « Maison marocaine de la photographie. »
On reconnait directement le style « kitsch » de l’artiste. Entre les faux foulards Louis Vuitton, les cadre orné de bouteilles rouges de Coca Cola, ou encore les coussins en plastiques fabriqués avec des sacs de couscous. Des tables basses en plastique, des signes en arabes, des caisses de soda qui forment un siège. Le ton est donnée.
Du design au studio photo
Né en 1961 à Larache, il a émigré à Londres avec sa famille à l’âge de 12 ans. Il a baigné dans les milieux hip-hop et reggae et travaillé dans le design avant de devenir photographe à la fin des années 1980. Fort de son succès, il est aujourd’hui exposé dans les collections du Brooklyn Museum, du Victoria and Albert Museum de Londres, du Los Angeles Museum of Contemporary Art.
La même formule est utilisé : des portraits de personnages assez kitsch habillés de couleurs vives, sur un fond également vif. Il les photographie dans la rue, aussi en studio, à la façon des grands maîtres africains (Malick Sidibé, Seydou Keita), avec comme décor un tapis en plastique comme ceux que son oncle tissait.
Parodie des photos de mode
L’artiste s’amuse à parodier les séances de photographie de mode réalisées avec des mannequins occidentaux dans les rues de Marrakech ou de Casablanca. Lui fait poser des marocaines, dans ses propres créations textiles. Des djellabas au caftans aux couleurs vives, à pois, aux motifs léopard ou camouflage, ou encore portant des sigle de marques de luxe. Elles imitent les poses des mannequins. Leurs babouches aux motifs originaux sont souvent projetées au premier plan. Il les prend en contreplongée, comme pour leur donner de l’importance.
Ses modèles sont voilées ou pas car, dit-il, « je comprends qu’on puisse trouver dérangeant que certaines des femmes que je photographie soient voilées, mais regardez comme elles sont modernes et provocantes ! Elles mêlent tradition et mode pop ; je les trouve d’une force et d’une puissance inouïes, absolument magnifiques ».
Pop-art d’aujourd’hui
Il encadre ses photographies avec des conserves, des boites de Coca, de harissa, de sauce tomate, de saucisses de poulet… Il crée une espèce de pop-art d’aujourd’hui, interrogeant la société de consommation, le monde de la mode et de la contrefaçon. D’ailleurs, pour rigoler, Rachid Taha l’avait baptisé Andy Wahloo (« Andy rien » en arabe marocain).
Il y a quelques variantes, des portraits en gros plan sont détourés à la peinture acrylique, avec un cadre en bois ou en pneu de moto.
« Je veux partager avec le monde entier ce que je connais du Maroc : une énergie et une attitude ; l’inventivité et le glamour de la mode de rue ; le graphisme étonnant véhiculé par les objets du quotidien ; la jovialité et la force de caractère des gens », dit Hassan Hajjaj.